Portrait d’Agnès Rousseau, représentante des usagers : « Nous avons un vrai rôle à jouer »

Les Représentants des Usagers (RU) occupent une place fondamentale dans la démocratie en santé. Quels sont leurs rôles ?

Agnès Rousseau, élue au sein du comité régional de France Assos Santé Ile-de-France et membre du comité de la ligue contre le cancer du Val d’Oise, nous explique son quotidien en tant que Représentante des Usagers.

Découvrez ci dessous son portrait

 

Chaque année, plus de 12 millions de personnes donnent de leurs temps bénévolement au moins une fois à une association, ce qui représente près d’un Français sur quatre. Dans le secteur de la santé, plus de 15 000 d’entre elles se chargent plus particulièrement de représenter et défendre les droits des usagers du système de santé : ce sont les représentants des usagers (RU). Agnès Rousseau, administrateur du Comité de la Ligue contre le cancer du Val d’Oise, est RU au sein du Groupe Hospitalier Intercommunal du Vexin et de la conférence territoriale de santé (CTS) du département. Comment vit-elle son rôle ? Nous lui avons posé la question.  

« Tu ne veux pas y aller… » Elle en rirait presque, mais l’histoire de son engagement auprès des patients tient en partie dans cette phrase tant de fois entendue : « Dès qu’une responsabilité se présente, tous les regards se tournent vers moi », rapporte Agnès Rousseau, 70 ans et près d’un quart de siècle de montées en première ligne, pour cette infatigable « bagarreuse ». Jamais à voler la vedette, mais toujours partante. Avec une telle approche, on ne s’étonnera pas qu’elle ait accepté de prendre à bras le corps le rôle de représentant des usagers, ou RU. Premier mandat de quatre ans en 2011, au sein d’un établissement de soins pédiatriques du département où elle réside, le Val D’Oise. Elle s’illustre ensuite dans une clinique privée, avant de rejoindre en 2019 le Groupe Hospitalier Intercommunal du Vexin, où elle siège actuellement, au nom de la Ligue contre le cancer.

 

Depuis plus de quinze ans, Agnès Rousseau est en effet secrétaire générale de l’association pour le département francilien. « En tant qu’association agréée du système de santé, la Ligue nationale contre le cancer a proposé à ses bénévoles des formations pour devenir représentant des usagers, raconte-t-elle. Quand des établissements du département ont sollicité notre comité pour représenter les usagers au sein de leur commission des usagers (CDU), nous nous sommes tout naturellement emparés de cette mission. »

Un continuum d’acquis

Nul doute que le fait d’appartenir à une association à la fois importante et bien structurée, notamment en matière d’information, a facilité le passage vers la représentation des usagers du système de santé. Mais l’expérience personnelle et professionnelle ont au moins tout autant compté dans le cas d’Agnès. « Avant de prendre ma retraite, il y a dix ans, je travaillais comme assistante au service social de l’Assurance maladie, un service volontiers aiguillon en matière d’avancées en direction des malades. De par mon activité, je côtoyais des personnes qui avaient de graves problèmes de santé. Comme leur situation était particulièrement complexe, j’ai fini par apprendre la législation. »

Dotée d’une bonne connaissance du système de santé et des textes de loi, rompue à la pratique de la conciliation pour faire progresser la cause des patients, elle eut le bagage et le savoir-faire nécessaires pour passer de l’autre côté. En l’occurrence pour entrer, à l’orée des années 2000, à la Ligue contre le cancer, à la suite d’un cancer qui l’a touchée en 1996, à l’âge de 45 ans. « De partenaire professionnelle des associations, avec lesquelles j’étais en contact dans mon travail, je suis également devenue participante en tant que patiente », résume-t-elle. Car ces deux actions menées concomitamment, loin de se contredire ou de s’annihiler, se sont nourries l’une l’autre en faveur d’un seul objectif : donner la parole aux usagers du système de santé et défendre leurs intérêts. « Il a fallu beaucoup se démener, se bagarrer (et ça, j’aime bien). Ce qui m’intéresse, c’est de pouvoir aider les malades. » Devenir RU s’est inscrit dans cette dynamique.

S’investir dans la vie de l’établissement

Mais même rôdée aux problématiques socio-médicales, Agnès Rousseau le dit sans détour : la formation pour devenir RU est indispensable. « On ne s’improvise pas représentant des usagers. Il faut savoir de quoi l’on parle : quel est notre rôle en Commission des usagers, qu’est-ce qu’une réunion de conciliation, quels sont les différents types d’indemnisations, etc., il y a un minimum de connaissance à avoir pour être capable de mener à bien son mandat. Et puis, ce n’est pas toujours facile de prendre la parole, donc la formation permet également de se sentir à l’aise et de prendre de l’assurance vis-à-vis de nos interlocuteurs, personne en charge de la qualité, cadres de santé et médecins ». Le RU apporte aussi avec lui son expérience de bénévole. Les activités ou initiatives prises au sein de l’association qu’il représente peuvent, selon les contextes, contribuer à débloquer un dossier ou fournir une piste de réflexion. Et puis, il y a les échanges avec les autres bénévoles pour la préparation. « Au niveau du comité de la ligue contre le cancer du Val d’Oise, il n’y a pas de référent. Nous sommes 4 représentants des usagers, donc nous discutons ensemble avant les réunions, nous partageons les documents et communiquons beaucoup entre nous, notamment sur notre positionnement », complète Agnès.

« Après, c’est à chaque RU de s’investir », reprend-elle. Outre qu’elle siège à la Commission des usagers du Groupement Hospitalier Intercommunal du Vexin, à raison de 4 réunions annuelles, elle fait également partie du comité éthique et bientraitance, qui se tient également 4 fois par an. Mais libre à chaque représentant des usagers de s’engager dans plusieurs comités à la fois, selon sa disponibilité et/ou son envie. Quoi qu’il en soit, siéger en CDU, qui traite des plaintes, des réclamations, etc., permet à « l’usager d’avoir un regard sur la vie de l’établissement », observe notre interlocutrice. « Récemment, un urgentiste, chef de service, a abordé la question des directives anticipées, suite à un souci qu’il avait eu. Le travail qui avait été fait par les trois associations représentées a permis d’alimenter le débat. Les médecins nous sollicitent volontiers, et c’est justement parce que l’on est amené à faire des choses avec eux qu’ils nous reconnaissent. »

Mieux informer les patients

En matière de reconnaissance, la difficulté vient moins de la direction des établissements de santé, et des personnels soignants, que des…usagers. « J’ai participé à des enquêtes de satisfaction menées par le Groupement Hospitalier intercommunal du Vexin. À la question de savoir si les patients hospitalisés connaissaient les représentants des usagers, les réponses ont été majoritairement négatives », regrette Agnès Rousseau. Elle se félicite d’ailleurs que l’un des objectifs de 2022 consiste justement à réfléchir, de concert avec le GHI de Vexin, à un dispositif qui permette de rendre les RU plus visibles auprès des patients : « En plus du livret qui est remis lors de l’accueil des patients, peut-être faudrait-il que les soignants prennent le temps de leur expliquer ce que l’on fait et qu’en cas de besoin, ils peuvent se tourner vers nous, les représentants des usagers ». De fait, leur action n’est pas anodine. Agnès Rousseau s’occupe en particulier des différends survenus à la suite d’un mauvais traitement ou de propos maladroits. « Lors d’une médiation, le médecin ou la direction peuvent expliquer ce qui s’est passé, et cette explication suffit très souvent à apaiser le patient ou ses proches. Les plaignants veulent surtout être entendus pour que ce qu’ils ont vécu ne se reproduisent pas. L’établissement est alors tenu de prendre les mesures nécessaires pour qu’il en soit ainsi. À cet égard, nous avons un vrai rôle à jouer », souligne Agnès Rousseau. C’est ainsi qu’à la suite d’un accouchement qui s’est mal passé, l’établissement qui faisait appel le week-end à une société d’intérim pour pallier le manque de sages-femmes, a changé sa méthode de recrutement. Et en cas d’erreur médicale grave, le représentant des usagers peut aussi accompagner et orienter le patient vers des professionnels aptes à défendre son dossier devant la justice.

Les établissements de santé qui recrutent les RU ont des contraintes et des obligations. Il n’est jamais trop tard pour le savoir, et faire valoir ses droits, en tant que patient, auprès de ceux formés pour les défendre. En tout cas, pour ce qui est d’Agnès Rousseau, ce travail mené sur le terrain a fait des émules : son petit-fils de 17 ans s’est récemment engagé dans l’association qu’elle représente, tandis que sa petite-fille, âgée de 15 ans, a émis le souhait d’effectuer son stage au sein du Comité départemental de la Ligue contre le cancer. « Cela me fait très plaisir, se réjouit-elle. Tous ces engagements n’ont pas été si mal vécus. »

www.ligue-cancer.net

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